Vieillissement, participation sociale et Empowerment

Coordination

Anne Boissel, Annie Hourcade


Une réflexion sur la vulnérabilité et sur les moyens de la surmonter en passe nécessairement par un questionnement sur la notion d’empowerment, au sens qui lui était conféré au moment même de son émergence, dans les années 1960 et 1970 (Calvès, 2009, p. 736) dans sa dimension éthique et politique.

C’est dans une telle visée que s’inscrit le volet “Vieillissement, participation sociale et empowerment” du séminaire ÉNÉE — Éthique, Narrativité, Environnement et Empowerment (Institut de Recherche Interdisciplinaire Homme et Société) en collaboration avec l’équipe de Recherche Interdisciplinaire sur les Aires Culturelles (ERIAC) et le groupe de recherches Prendre en compte la Vulnérabilité (PCV), le Centre de Recherches sur les Fonctionnements et Dysfonctionnements Psychologiques (CRFDP) (Université de Rouen Normandie), le Groupe de Recherche sur les Cultures et les Identités de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (GIRCI) et la Communauté de Recherche Interdisciplinaire sur la Vulnérabilité de l’Université Laval à Québec.

Comment définir la “population âgée” ? En quoi le critère d’âge peut-il être un indicateur d’une nouvelle problématique sociétale ? Pour autant régulièrement, et plus encore dans la crise pandémique que nous traversons, L’augmentation de la population des plus de 65 ans soulève des enjeux sociaux, politiques et économiques importants (Billette et al. 2018) et appelle une réflexion interdisciplinaire et internationale dans la perspective de l’élaboration de dispositifs innovants pour accompagner cette évolution de la société.

Le concept de fragilité de la personne âgée fait désormais partie du vocabulaire gériatrique (Trivalle 2000 ; Dramé et al. 2004 ; Chassagne et al. 2009 ; Béland et al. 2015) et, de manière plus générale, le grand âge est traditionnellement associé à la vulnérabilité (Goodin 1986, p. 83-89 ; Pandelé 2008 ; Martin 2013, p. 294). Des problématiques nouvelles, en effet, voient le jour à mesure que l’individu avance en âge : perte d’autonomie, dépendance, isolement, qui soulèvent des questions éthiques (Murray 2008 ; Holstein et al. 2011 ; Comité Consultatif National d’Ethique 2018), mais aussi politiques et économiques, notamment en raison des contextes budgétaires restreints (Lavoie et al. 2003). De plus la stigmatisation, l’exclusion sont des risques possibles non négligeables qui planent sur l’avancée en âge.

La valorisation de la participation sociale apparaît comme une réponse possible apportée aux défis posés par le vieillissement de la population, tout particulièrement parce que les efforts accomplis dans le sens d’une plus grande inclusion et participation sociale des aînés sont susceptibles de contribuer au vieillissement en santé, notamment en termes de bien-être et d’autonomie (Bryant et al. 2001). De fait, le modèle conceptuel du vieillissement en santé (Raymond et al. 2018), du vieillissement réussi, du bien vieillir (Rowe et Kahn 1997 ; Bengtson et Schaie 1999 ; Lupien et Wan 2004 ; Cardinal, Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, et Institut national de santé publique du Québec 2008 ; Crignon 2010 ; Hummel et al. 2014) ou encore du vieillissement actif (OMS 2002), quelle que soit la formulation privilégiée, est indissociable d’une réflexion sur la place des aînés dans la société.

Les objectifs généraux de ce chantier coïncident avec les objectifs du vieillissement réussi. Il a pour vocation première de contribuer, même modestement, à la réduction des inégalités qui touchent les personnes âgées. Les enjeux sont en effet à la fois politiques et sociaux : fournir des outils permettant aux aînés de mieux faire entendre leur voix au niveau démocratique, et sociologiques et culturels : modification du regard, encore très négatif, porté sur la vieillesse (Billette et al. 2018). Par ailleurs, il est possible que pour les décennies à venir cette modification du regard et de la participation sociale des aînés soient favorisées par la montée en âge d’une génération qui a connu, au moins pour une partie d’entre elle, une amélioration de sa santé et de ses conditions de vie, et l’habitude d’une prise de pouvoir dans son engagement sociétal.

Prenant, au moins partiellement, ses distances vis-à-vis d’une conception de la vieillesse perçue sur le mode du retrait, de la déprise ou du désengagement (Cumming et Henry 1961 ; Guillemard 1972 ; Caradec 2009 ; Meidani et Cavalli 2018) le volet “Vieillissement, participation sociale et empowerment” du séminaire ÉNÉE propose de privilégier une approche de la vieillesse sur le mode du renforcement de soi et du maintien ou du rétablissement, même si c’est sur un mode alternatif, de l’inclusion et de la participation sociale, voire de l’engagement.

Il interrogera aussi le rapprochement du modèle de processus de production du handicap à un modèle à venir sur le processus de production de la personne âgée, en mettant au centre la réflexion sur l’environnement, la culture et la responsabilité sociétale.


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